(jeunes Tortues vertes - Chelonia mydas, Perenthian Islands, Malaisie, le 17 août 05)
Il n’y a plus guère d’endroits dans le monde où la vie est laissée à sa vie. Là où l’homme s'abstient de détruire, il s’empresse d’organiser, d’aménager la protection. Sous son geste, la nature est devenue un jardin méthodiquement cartographié. La vie sauvage, quelle aventure ! Elle est contrôlée, calibrée, modélisée. Aucun risque de se perdre, tous les chemins mènent à l’homme, même du cœur de la forêt primaire. Partout les flux du mystère sont régulés. La magie s’institutionnalise (ce mot !) à un rythme tel qu’on nouera bientôt des cravates en nylon au col des montagnes. Ainsi sur l’un des derniers lieux de reproduction de la tortue verte en Malaisie, c’est un vieux monsieur assis sous un parasol orange qui surveillait les naissances, la glacière des sandwiches à ses pieds. La visite n’était pas encore tarifée certes, mais ce folklore paternaliste ressemblait davantage à une attraction touristique qu’à une activité désintéressée. Oubliez les documentaires qui mettent en scène avec force lyrisme la liberté du monde animal : les œufs de ces tortues étaient protégés dans des caisses de polystyrène. En environnement comme en économie, les dysfonctionnements du système appellent un interventionnisme en grand costume et à petits pas, assez peu compatible avec le rêve.
Les commentaires récents