Wallaby agile (Macropus agilis), Katherine Gorge, Northern Territory, Australie, le 6 août 2007
L’Australie, j’en rêvais depuis
l’enfance. Cette grosse patate germée en bas à droite sur les cartes Vidal
Lablache m’intriguait, m’attirait. Dans ma petite tête remplie de songes, la
série télé Skippy le Kangourou et l’album de Tintin Vol 714 pour
Sydney avaient dessiné ce pays comme une contrée à part, un endroit du
monde spécial, hostile et prodigieux à la fois, aux paysages de légende et
peuplé de créatures étranges. Projet souvent différé par les infortunes de la
vie, le cinquième continent a donc conclu ma série de voyages lointains entamés
en 2003.
L’impression que j’en retire à
chaud est très positive. Je ne crois pas m’être aussi souvent émerveillé en
voyage, j’ai même cru entrer au paradis, pardonnez-moi l’ingénuité de la formule, en plongeant mon regard sous les eaux de la Grande Barrière de
Corail. L’approche d’animaux quasi mythologiques, Wallabies, Koala,
Ornithorynque, Opossum, Renard volant et tous ces lézards bizarres qu’on
appelle encore Dragons, a renforcé si besoin était ma passion pour la vie
terrestre. La découverte des légendes aborigènes, la relation de magie créée
voilà plus de 40 000 ans entre l’Homme et la Nature, m’a aussi beaucoup
questionné sur notre devenir commun. L’Australie, un territoire grand comme les
Etats-Unis, avec à peine plus de vingt millions d’habitants : vous
imaginez l’espace disponible pour le rêve et l’espoir.
Je crois que les Australiens, du
moins ceux issus du settlement, ont conscience de leur bonheur.
Mieux : ils savent le communiquer. Quand nous autres Européens geignons
sans cesse sur notre sort, le front bas, les Aussies n’arrêtent pas de trouver
la vie « fantastic », le regard qui brille et les bras ouverts. Ce n’est
pas une erreur de boussole si plus de 30 000 jeunes Français de moins de 30 ans
sillonnent actuellement le bush, émigrés en quête d’une vie différente,
ailleurs que dans les couloirs souvent kafkaïens de notre Hexagone.
Les arguments pour contraster l’image de l’Australie ne manquent pas. Le
succès du modèle australien repose sur une dynamique de colonisation, avec tous
les effets pervers qu’un tel mouvement entraîne. L’établissement des Européens
à la fin du 18e siècle a provoqué de graves désordres écologiques,
avant une récente prise de conscience qui commence à porter ses fruits. Elle a
surtout précipité la déculturation, sinon le génocide d’une partie du peuple
aborigène. Les perspectives de réconciliation sont longues à entrevoir après
une gestion, perpétrée jusqu’à la fin des années 1960, qui ne fut pas sans
rappeler l’apartheid sud-africain dans certains états. Le drame se prolonge. Dans certaines villes
traversées comme à Tennant Creek, dans le Northern Territory, j’ai vu des
aborigènes survivre dans des conditions de sous-prolétariat. L’actuel
gouvernement, très conservateur, s’est aussi aligné sur les positions de George Bush, que
ce soit le refus du protocole de Kyoto ou l’ingérence armée en Irak.
Mais les Australiens ne sont pas dupes et ne pardonnent rien à John Howard. Les
derniers sondages avant les élections législatives prévues cet automne
laissaient espérer un changement d’administration dont on peut aisément
supposer qu’il renforcera le lien culturel et politique avec l’Europe.
(Photo spéciale dédicace à Armelle, qui adore les animaux à euh... grandes oreilles)
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