Madurai, Tamil Nadu, juillet 2008
A toute chose malheur est bon, rassurait ma grand-mère.
Et si on profitait du désastre financier qui court pour se défaire de nos égoïsmes?
Et si la chute des bourses nous donnait l'élan d'insuffler enfin les valeurs du coeur?
Chiche. Quelqu'un a les plans?
Cairns, Queensland, août 2007
Ce plaisir qui souleva nos tempêtes, qu'en reste-t-il dans le tiroir du souvenir? Le plaisir surgit d'une onde, le désir, qui l'emporte comme elle l'a poussé. Ce qui nous mord le ventre ne tient pas sur la peau du temps. Et j'ai beau fouiller dans les anciens cris, plonger mes mains dans la malle de nos plus folles nuits, non, je ne retrouve rien. Le plaisir est un mot sans image, une inconnue de la mémoire, intraduisible au passé.
Pondichéry, Tamil Nadu, juillet 2008
Sous la grise menace, si blême d’oubli, de la brume
de mer, il vaut mieux s’asseoir. Le long de la promenade, les hommes sages ne font
que s’arrêter. Par petits paquets scintillants de deux ou trois, ils retiennent
la mémoire de la ville dans des conversations à n’en plus finir. Des mots
pour vivre et pour durer. Ils ressemblent à des vieux séraphins de lumière et
par leurs voix, dans la douce langue indienne, ils rapiècent le rêve, la
mélodie des nuits anciennes avec le tissu d’un improbable automne. C’est
toujours septembre ici et ça ressemble au destin des hommes.
Pondichéry, Tamil Nadu, juillet 2008
L'ancien comptoir français peine à se sortir de sa torpeur coloniale. Sa ville blanche, qui donne sur une mer grise et hermétique, baille son ennui sous les bougainvillées. La longue plage de Pondichéry offre un spectacle en suspens, estompée par la nostalgie et l'humidité, grouillante de personnages pensifs et à peu près immobiles. Plage comme un travelling avant bollywoodien, jonché de symboles usés et de clichés magnifiques: la vendeuse de ballons, le marchand de glaces, un dresseur de singe, un percussionniste, des amoureux qui s'isolent, quelques cerfs-volants et des joueurs de pétanque sans pastis ni cigales, arbitrés par les lunettes cerclées d'instituteur d'un haut Gandhi figé dans la pierre. A chacun sa saynète, à chacun son rôle, un peu à côté de son mouvement, sans vraiment lever la tête. A la fin du jour, les odeurs d'épices montent au-dessus de la mer. Les enfants resurgissent et rassemblent leur malice affamée autour des épis de maïs qu'on grille, retourne, mitonne ou mijote à feu doux; le petit feu tremblant et paisible des mères qui défient toutes ensemble la bruine fade.
Amanite vireuse (Amanita virosa), mortelle, massif de Belledonne, Isère, août 2008
Petit aparté dans ma saga indienne. Ces jours-ci, j'ai des flux conséquents de lecteurs avec des requêtes qui sentent bon les sous-bois : "Où trouver des champignons en Isère", "Champignons dans les Alpes", "Où cueillir les morilles" (qui comme chacun sait sont des espèces terriblement automnales), "Recette pour les chanterelles violettes" etc. Je me sens redevable de ces personnes affamées qui contribuent au bonheur de mes statistiques de visites. Aussi, je m'empresse de satisfaire leurs demandes. UNE FOIS POUR TOUTES.
Les Amanites phalloïdes, je les trouve généralement sous les chênes, très près de l'agglomération grenobloise. Il suffit de monter sur la colline du Murier, à Saint-Martin-d'Hères. Trois virages et hop, c'est là. Les Amanites vireuses sont plus alpestres. On en voit plein en ce moment dans la mousse des sapinières qui courent sur les balcons du massif de Belledonne, par exemple sous les stations de ski de Chamrousse et des Sept-Laux, souvent avec les Amanites Tue-Mouches d'ailleurs. Le Cortinaire montagnard, malgré son nom, pointe son chapeau roussâtre à des altitudes modestes : je ne l'ai guère vu que dans les forêts de Chambarans, autour de Roybon. Le Lactaire à coliques, si bien nommé, préfère les stations acides sous les pins du Trièves, vers Monestier-de-Clermont. Quant au Bolet satan, il hante ces jours-ci les forêts calcaires des rebords exposés de la Chartreuse, vers Saint-Hilaire-du-Touvet.
Voilà pour les espèces les plus décoratives du moment. Si le besoin devait malgré tout se fait encore sentir, je vous parlerai dans un prochain billet des Gyromitres, des Tricholomes tigrés et du Clitocybe du bord des routes (qui ne pousse pas que sur la côte de Moirans - les gens du cru apprécieront le jeu de mots). Et d'ici là, bonne cueillette, cette fin d'été est très propice !
Maison de l'International, Grenoble, Isère, juin 2008
La blogosphère l'a honteusement boudé mais l'ami Jean-Baptiste Strobel tient sa revanche dans la vie vraie. Il expose ses photos impressionnantes du Pôle sud à travers "Regard sur la biodiversité de l'Antarctique", dans le parvis des Droits de l'Homme de la Maison de l'International à Grenoble. Un travail technique exigeant, une recherche esthétique soignée, un militantisme feutré et d'autant plus efficace : les images de Jean-Baptiste donnent le vertige autant qu'elles nous aident à nous saisir enfin de la beauté fragile du monde et du rôle que l'homme doit y tenir. L'argument majeur pour passer à Grenoble d'ici le 27 juin, avant que l'expo ne voyage ailleurs.
[expo dans le cadre de l'Année polaire 2008, en partenariat avec le Centre culturel scientifique technique et industriel et la ville de Grenoble]
L'araignée Pholque (Pholcus phalangioides) s'empare d'un papillon (une Pyrale), Domène, Isère, mai 2008
Je poursuis intensivement l'élevage des araignées chez moi. Elles me servent d'insecticide biologique : moucherons, moustiques et mites ne résistent pas longtemps aux appétits féroces de la succube échassière. Mais depuis quelques jours, les ennemis ont changé de catégorie : les frelons rôdent sur la terrasse. Vais-je devoir recruter des tarentules pour faire face à ces monstres aéronautiques?
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